Session de rattrapage

L’invitation tombait à pic, ils ont un sixième sens, ces gars là ! Depuis des mois, les Warriors, petite bande d’Antillais lockés, me proposaient leurs services, m’assurant que je serai traitée comme une reine, massages et petits fours, bonne humeur et plaisir dans le respect…
6… Hésitante, tout de même.
On sortait de la « longue diète », je manquais d’entrainement.
Max, leur meneur m’avait connue dangereusement insatiable. Et malgré un physique moins puissant que ceux que j’affectionne pour passer au rouleau compresseur, sa présence à certaines soirées m’avait sauvée de gros morfales, bite à la main et respect resté au vestiaire…

Mais je me trouvais moche, corps moins affûté, ramollie d’abus vin rouge/chocolat amer. Accepter serait une imposture, les jeunes gars au taquet pigeraient vite la supercherie.
Merde, la challengeuse n’a pas déjà dit son dernier mot, l’heure de sa retraite du cul n’a pas déjà sonné?
J’approche des 60, ils en ont 30, et je leur passe la commande du vertige de mon corps livré à leurs 12 mains et 6 bouches, je rêve mon abandon au poulpe géant.

Ça motive pour le sport et le régime, ce genre de défi. Vitamines, sommeil et sucres lents: la piste, le ring, le grand bain m’attendent !
Le jour J, j’en mène pas large, moins impatiente que stressée comme avant l’examen…
A votre tour, candidate Secret-Lady !
Comme si l’exercice du plaisir tenait implicitement de la performance, que j’avais un titre de « vraie libertine » à défendre, ma salopitude à prouver…
J’avais plutôt un foutu manque à rattraper, un outrage à nettoyer, une vengeance à bouffer !
Agrumes, fruits secs, épilation, vernis, crémage… Ma tenue est choisie, sexy pour les faire tilter, tout en autorisant les transports en commun sans atteinte à la pudeur. Mais ne me faîtes pas attendre dans votre gare de banlieue, mon coeur bat déjà trop vite…
Max était là, et à l’appartement, les autres patientaient.
Je scanne ces 6 visages scrutant ma réaction dans cet antre très visiblement passé au grand ménage pour l’occasion… Sur une table, curieuse installation baroque de bouteilles d’alcools divers, de bougies, huiles de massage, lubrifiants, menottes, martinet, godes, vibros et autres bidules dont il faudrait m’expliquer la finalité.
Bim, comme la comédienne dont le trac s’évapore à peine un pied posé sur la scène, je suis soudain plus légère sur mes talons, j’envahis l’espace, ma trouille a fondu, ma nuit sera marathonienne, je vais breveter mon régime baise-sportive, on boit quoi?
Plongeon de slammeuse, je body surfe dans un cri qui dure des heures. Tous ces doigts, ces bouches, cette huile, cette sueur, cette salive, ce foutre et mes litres de cyprine…

Des heures des heures de voltige…
A plusieurs…
Madame ne rêve pas.

Cette nuit, je suis une ama apnéiste dans les eaux des Caraïbes.
Cette nuit, j’ai battu mes records.
De mes plongées dans nos profondeurs orgasmiques, j’ai remonté les perles du diadème dont ils couronnent la reine, au matin, haut, très haut, sur la plus haute marche de leur podium.

Dans 6 jours, j’aurai le souffle fier et enthousiaste pour éteindre 60 bougies !

(Hokusai, extrait de Le rêve de la femme du pêcheur, ou l’Ama et le Poulpe,1814)

Laisse toi aller…
  1. Ne dis rien…
  2. Merci les Bleus !
  3. Château rouge
  4. Fugue
  5. Anniversaire

Laisser un commentaire