AdoPte un abdominant!

Personnellement, je préfère un petit bidon sur lequel me caler. Mais ses photos étaient en noir et blanc, c’était déjà un bel argument.
Au cul des bus, les affiches donnaient le ton, et je cherchais de la (nouvelle) compagnie, pas la 7ème (Laughing Out Loud, un seul ferait l’affaire !), mais un semblant de 7ème ciel où laisser exploser mes orages. J’installais donc l’appli. Pour la date de naissance, toujours 6/9/1969, parce qu’il faut bien se marrer, et un de ces pseudos que j’enfile selon mon humeur, 3 photos et c’est parti, kikis à volonté, ça va très vite, it’s raining men, pas vraiment Alléluia, car de cette profusion suinte plutôt de la tristesse… De fait, ça m’aurait davantage encouragée à aller trainer au Sexodrome, pour m’acheter un nouveau gadget encore plus à la pointe de la dernière technologie, multi-orgasmes garantis, si je n’avais pas eu ce besoin de peau chaude, d’odeurs et surtout… de mots.
Entre désespérantes images pseudo-humoristiques et photos porn-art, soudain, une trame noire et grise, « the » tablette, en zoom occupant tout mon écran, noir luisant, contraste saturé, un Outrenoir à la Soulage, arrêt sur image, mes paumes explorent déjà la ronde-bosse, au ralenti dessiner les ombres, laisse moi t’explorer, de la langue et des doigts, be mine, please, drive me crazy, I want you… Bref, moi je veux bien « t’adopter »!
Cerveau brouillé, neurones court-circuitées, plombs pétés, whouahhh en émoji « yeux étoiles » en avalanche, et lui, le gars, qui joue le surpris!
Évidemment, de mon côté, je ne pouvais pas oublier que j’avais davantage entretenu ma cellulite à grand renfort de vin rouge-chocolat durant tout l’hiver, que mes abdos à la salle de fitness… Mon rameur prenait la poussière, mes ceintures réclamaient un nouveau trou, mais je me persuadais qu’il y avait de quoi empoigner et qu' »ils » aiment ça. N’empêche, là, je complexais grave devant le quadrillage parfait. Qu’il savait mettre en valeur, le bougre, par le classicisme élégant du noir et blanc, renforçant le sculpté par le contraste des ombres et le brillant de la sueur. L’effort, le boulot, l’entretien… Peut-être un peu de frime et de narcissisme aussi ? C’est ça, fais l’innocent, tu sais bien que ce n’est pas si courant, et de mon côté, je ne suis pas de celles qui font leur choix au physique! Mouais, on le connait le discours, beauté intérieure, humour et répondant, dit celle qui bidouille du selfie avec force applis qui lissent, contrastent, gomment… Tricheuse ! Yep, mais ça exprime aussi un certain sens de l’esthétique, non ? N’avez-vous donc jamais écarté un profil parce que, sur les photos, votre regard était surtout attiré par le bazar de la pièce environnante, les produits d’entretien ou le panier à linge qui déborde ? Moi si, souvent, en me disant que bordel, avec nos smartphones c’est pourtant easy de faire un cliché correct, et que, si simplement pousser hors champ la bouteille de javel ou les jouets du petit ne vient pas à l’idée du mec (ou de la meuf), ça ne le fera pas… A ça, on m’a souvent rétorqué que j’étais trop compliquée, trop exigeante, que ce n’était qu’une photo et blablabla… Ben non, justement ce n’est pas « qu’une photo » et pour moi ça veut dire beaucoup !
Alors donc, je lui dis à quel point la sienne est dingue, et que le sujet l’est encore davantage. Il aime bien le style de mon album, les mots de ma présentation, c’est un bon début, p’tèt qu’on pourrait se dévoiler nos tronches? Et là, re-whouahh… (Comme on sait tous que la triche est un sport ici, je doutais tout de même que ce soit vraiment une photo perso. Puis, il arrive aussi très souvent qu’il y ait un choc contradictoire entre là où l’esprit va direct divaguer à la vue d’une silhouette, et la découverte d’un visage… ). Mais non, la tête au-dessus de la tablette est plus que sympathique, le gars est beau partout, un truc malicieux dans le sourire, le regard qui tue, il est super bien gaulé, il a une grosse envie de baiser, tout en annonçant être aussi très cérébral: à ce stade, c’est quasi jackpot ! Bref, en avant pour les échanges jusque tard dans la nuit, les photos et les sextos, histoire d’être bien certains du désir reciproque, et préparer le terrain. (Et, au passage, j’avais repris le sport à fond…)
Après ma semaine d’essai, mon abonnement ne serait pas prolongé, aucune velléité d’adopter toute une équipe. Nos messages me comblaient, nos masturbations enfiévrées à distance et nos voix dans les oreilles étaient vite devenues un rituel quotidien. Sa façon de me chuchoter des trucs salaces me faisait bouillonner, et plus précisément ses envies de domination énoncées d’une voix quasi enfantine. Le combo macho-cérébro-biscotos faisait totalement effet sur ma petite personne de plus en plus en manque…
Come on now, je suis à toi !

J’avais apprécié qu’il ne soit pas pressé et me consacre ce temps précieux. A force, mes complexes fondaient, ça me rassurait de savoir qu’il viendrait aussi pour mon esprit (emoji « auréole »).
Donc, comme après un délai que nous aurions implicitement conclu comme étant de rigueur, let’s go, je me suis lancée, quand, où, comment ? Là, aussi, nickel: disponible, arrangeant, se déplaçant…

Rouen, sauna, midi.
Il est là. Bien plus petit que moi, ce que ses photos ne me disaient pas, avec son léger zézaiement totalement craquant, jean déchiré qui laisse apparaître la fameuse bande élastique annonçant la marque du boxer…
Je souris d’être charmée à défaut d’être impressionnée. Une chose est sûre, je me suis un peu emballée question domination, ce mignon-là ne remplira pas cette mission.
Mais, gentleman, prévenant, attentionné, sa gestuelle est rassurante, je sais déjà que je ne m’ennuierai pas.


Quand ses vêtements glissent, il n’y a pas tromperie sur le sculpté parfait aux sombres reflets. Il ne m’écrasera pas, ne me plaquera pas comme une grosse brute contre un mur pour m’enculer direct, mais mes mains caresseront le modelé parfait du marbre noir, j’en salive d’avance…

Quand le préambule jaccuzi l’autorise à me livrer des confidences, comme si la confiance lui permettait de se délester d’un fardeau, il est terriblement émouvant.
Je suis prête à m’ouvrir.
Quand, après m’avoir dévorée, en expert, partout, limée, en athlète, partout, tournée dans tous les sens, en danseur à la précision redoutable, soudain il m’ordonne en rigolant de prendre le relais, il apporte un humour inattendu qui nous entraine dans une nouvelle cavalcade rythmée par nos éclats de rire.


De douze à vingt heures. Sans voir le temps glisser. Surpris, joyeux… Du sport, des rires, des confidences, des caresses, des massages, et de la tendresse, du respect, de l’écoute, de l’entente, de la compréhension…
Mes yeux le suivent encore dans les miroirs et sous la douche. Il est magnifique, une beauté rare renforcée par une simplicité désarmante. Et alors même que sa plastique a aimanté tous les regards, il est resté toujours concentré sur mon plaisir.
Bonne pioche, aucun regret pour le gadget du Sexodrome, j’avais bien fait de regarder derrière la trame !
Alors… certes pas « abdominant », mais totalement « abdorable »…
Bref: t’es »Abdopté », p’tit mec !

#inspirationrememberMoussa.

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